Si Björk constitue à bien des égards une figure cosmopolite de la pop music, ce n’est pas tant pour son ouverture multiculturelle que pour son lien à l’Islande qu’elle est reconnue, trahissant ainsi une forte tendance au « boréalisme » – c’est-à-dire à l’exoticisation – s’agissant de la réception internationale de son œuvre. L’objet de cet article consiste à déterminer dans quelle mesure la musique de Björk s’apparente effectivement à une musique nationale, c’est-à-dire – selon ses propres termes – à « une pop music islandaise moderne ». L’album patriotique Homogenic (1997), et plus précisément la chanson « Jóga » conçue comme une « sorte d’hymne national », servent de point de départ à cette investigation qui interroge au fil de sa carrière à la fois les racines musicales islandaises dans lesquelles Björk puise pour créer son œuvre, le rapport au texte et à la langue, ainsi que la question du timbre et de l’espace sonore comme évocateurs de la nature islandaise. Ces aspects, étroitement associés au long des albums de Björk, dessinent une musique au sein de laquelle la question du lieu est fondamentalement reliée à une dimension d’identité nationale.